Actualité de l'Institut de Physique - CNRS - Novembre 2014
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Une stratégie mécanique pour réduire l’irrégularité du pelage des films adhésifs. Le «scriiich» caractéristique du décollement d’un adhésif est la signature d’une instabilité mécanique indésirable dans de nombreuses circonstances. Dans l’industrie, ce phénomène endommage l’adhésif, réduit ses performances et produit un bruit au-delà des normes sonores, tandis qu’en médecine, le patient à qui l’on enlève un pansement subit des douleurs et parfois même des blessures supplémentaires. En analysant de manière systématique la dynamique du décollement d’un adhésif, des physiciens de l’Institut lumière matière - ILM (CNRS/Univ. Lyon 1), du Laboratoire de physique de l’ENS Lyon (CNRS/ENS Lyon/Univ. Lyon 1) et du laboratoire FAST (CNRS/Univ. Paris-Sud), viennent de
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Dans le régime où le pelage est irrégulier, lorsque l’on tire sur l’adhésif pour le décoller, le ruban commence par se tendre. Lorsque la tension est suffisante, le décollement se produit d’un coup, réduisant instantanément la tension. Le décollement s’arrête de lui-même jusqu’à ce que la poursuite du mouvement tende suffisamment le ruban pour que le décollement reprenne. Dans ce type d’instabilité connu sous le terme générique de colle-glisse (stick-slip en anglais), la succession rapide d’arrêts et de mouvements rapides produit un bruit caractéristique que l’on retrouve lorsqu’une porte grince ou qu’une craie crisse sur un tableau.
L’origine est une compétition entre l’inertie du ruban, son élasticité et son énergie d’adhésion. Pour comprendre plus précisément ce phénomène, les physiciens ont réalisé un dispositif expérimental permettant de décoller de manière contrôlée une bande d’adhésif longue de 3 mètres collée sur un support plan. En synchronisant la vitesse d’avance du support sur lequel est collé le ruban adhésif et celle du rouleau tirant ce dernier, il est possible de fixer trois paramètres : la vitesse de décollement, entre 1 centimètre par seconde et 4 mètres par seconde, l’angle de décollement, entre 30 degrés et 150 degrés, et la longueur de ruban libre, entre 20 centimètres et 1,3 mètre. Grâce à leurs mesures, les physiciens ont découvert que l’instabilité existe dans une gamme de vitesse plus petite pour un angle de pelage important. Ils ont interprété ce phénomène par la forte augmentation de la raideur effective du ruban avec l’angle de décollement. Lorsque l’instabilité existe pour un angle important, son amplitude est très atténuée par rapport aux faibles angles et le mouvement saccadé se transforme en de petites oscillations de la vitesse de décollement. La modélisation théorique de ce phénomène conduit les chercheurs à interpréter cette réduction comme un effet inertiel.
Pour en savoir plus : Peeling-angle dependence of the stick-slip instability during adhesive tape peeling, M.-J. Dalbe1,2, S. Santucci1, L. Vanel2 et P.-P. Cortet3, Soft Matter
(2014)
Contact chercheur : Stéphane Santucci, chargé de recherche CNRS
Article posté le 08/01/2015